salut l’ami,
tu sais à quel point pour moi les jours de moto ont été à compter sur les doigts d’une main de lépreux suite à ma chute idiote et pied cassé de l’année dernière. Donc grosse frustration accumulée et ce mois de Juin qu’on avait prévu de passer en France, j’ai lâchement dégainé le premier et que les juilletistes et aoutiens me pardonnent pour ce que fut le back to the roots 3, une sortie au mois de juin. On s’en est payé une bonne tranche en Bretagne grâce à Gilbert et sa « tendinette » d’Achille qui nous ont bien gâtés en paysages superbes avec une météo splendide et de moments très sympathiques autour de bonnes tables. Et comme je suis un peu pas normal, j’ai donc eu ce projet fou d’assembler un replica de compé client d’Elefant depuis l’Asie ou je vis et bosse depuis deux ans maintenant. Rêve de gosse, facilité par le fait d’avoir un job maintenant qui permette de financer ce genre de truc inutile donc parfaitement indispensable. Rassembler les informations, commander les pièces et se faire livrer dans les temps à 10 000km de distance, tout cela demande un peu de coordination et de logistique locale que je remercie au passage. C’est pas grand-chose si tu t’y prends à l’avance. Le plus compliqué est d’assembler en un temps imparti et forcément insuffisant la moto car on dépend toujours d’une connerie, d’un retard, d’un oubli et ce temps c’était 48 heures.
Cela dit, en se levant 05:00, c’est une tâche aisée grâce à l’excitation et au décalage horaire ; les deux journées passées dans l’atelier sont mises à contribution pour assembler mon Lego géant. Un peu de motivation distillée de la part du gars TTroncs et je décide de monter les FCR. L’ayant déjà fait sur le SS, ce n’est pas en territoire inconnu que je me suis aventuré. Bon le bras oscillant rallongé grâce aux bons soins du Sieur TTroncs et du forum Allemand, les biellettes farceuses car celle du Grand Canyon est plus longue que celle de l’AC donc le cul de la moto s’affaisse, les roulements changés pour des neufs, l’amorto ohlins d’usine, bah oui on leur a envoyé un amorto a modifier selon nos desiratas comme sur les motos engagées à l’époque (!) le réservoir auxiliaire peint, les pates soudées sur le cadre pour supporter le réservoir auxiliaire, le nouveau sabot qui se fixe au berceau en alu avec des nouvelles pattes soudées elles aussi etc… tout ceci c’est un peu de travail mais c’est Noël ce matin dans mon petit atelier familier où je peux assembler en jubilant toutes ces pièces. Je les ai assemblé tellement de fois dans ma tête que c’est presqu’une formalité ! je t’assure que les seuls trucs chiants ont été dus au manque d’accessibilité de cette Cagiva plus qu’à des questions : mais ça sert à quoi ce truc ? Bref, petit grain de sable dans cette machine qui baigne dans l’huile, la fourche Marzocchi Magnum en 45 n’est pas prête à temps. Dommage, il faut fabriquer une patte pour l’étrier de frein et l’axe de colonne de direction n’a pas le même diamètre que celui d’origine. Pour ne pas risquer de foirer le montage, je prends la décision de partir avec la fourche d’origine, ce qui me permet de conserver le train de pneus route à la place des tétines prévues et déjà montées sur ces chouettes jantes Exel noires et de ne partir qu’avec 24 heures de retard
Je charge ma moto assez chichement, des sandows de vélos pour assurer la tente, le duvet et le tapis de sol : roule. j’achèterai un tee shirt de la concentration pour ce qui sera du linge nécessaire…. Elle démarre facilement et me voilà sur la route à 05:30 dans la pénombre et le brouillard qui traine paresseusement sur le plateau du pays de Caux. Ça craint, ça colle sur le masque de cross, je vois rien… pluie classique à Barentin, zob je n’ai pas pris de combi de pluie, je n’ai pas la place et ni envie de faire cette sortie sous l’eau, si j’ai ca durant 1500 bornes….. Contour de Paris par le nord via les routes gratuites, j’ai perdu un des deux écrous qui tiennent le silencieux et une BTR qui fixe l’avant de la selle sur le réservoir. Le reste tient bon. J’ai peu à peu mal au fion, la selle est basculée vers l’avant, je suis assis sur les nouilles quoi et n’ai pas assez de mousse à cet endroit dans la selle Tecnosel. La fourche d’origine avec les roues éponymes plus petites que celles prévues mais pas montées. Un gamin à la station-service demande si ça roule encore ces motos... « bah non comme tu le vois, je suis venu à pied ». C'est con un Zarma de banlieue avec sa casquette a visière plate.
Que la France est belle en cette fin de mois de juin. Ca sent les foins, les premières moissons, les fermes avec les bêtes, bref, je suis aux anges. Je suis peinard sur ma meule en cours de fabrication et je descends par les départementales pour les Vosges, en retard de 24 heures sur mon agenda mais je m’en fous, pour retrouver les Elefants Riders, pour une réunion internationale svp ! c’est une première pour moi ce genre de concentration. Ce qui m’a décidé c’est la gentillesse, la franche et réelle camaraderie qu’il règne sur le forum français. Et puis j’ai envie de rouler avec mon Elefant qui a glandé depuis son accident contre le car des pompiers. Bon, programme un peu dense car si samedi descente de 750km, c’est pour remonter le lendemain d’autant de bornes vers ma Normandie… Tu vois s’il ne faudra pas non plus trop trainer et s’extasier devant les chapeaux plats de déménageurs bretons des vosgiens une fois sur place. J’arrive sur le coup de 14:00 le ventre vide et suis vite accueilli très sympathiquement par un local de l’étape, Sébastien qui m’aide à m’installer et m’emmène me taper la cloche et boire moultes bières : un programme dans mes cordes. Lucky et Joel me proposent de les suivre en balade l’apres midi, j’en viens les gars, la mienne a duré 750 bornes, donc je décline la leur prudemment et puis j’ai pas leur niveau, donc prudence... J’ai mal au cul, je suis vanné et ai besoin / envie de me reposer. Papotage très sympa avec Seb, puis un Suédois qui a assisté à 14 des 15 Treffen que comptent cette incroyable bande de passionnés d’Elefants du monde entier. Je tape la discute avec les teutons dispos, ça me permet de dépoussiérer mon schpountz tout rouillé. Le soir, les gars rentrent de sortie, il y a eu un empilage dans un chemin de quelques 900ie qui heureusement sortent tous intacts à quelques éraflures près et clignos explosés de leurs cabrioles d’ados farceurs. Quelqu’un à du Niflugel ? Lucky, Joel, Allamas… ah ah ah….
Rencontre avec Tchi qui arrive de Rouen avec sa femme et la moto sur la remorque. On s’est parlé via le forum, marrant de voir les gens en chair et en os. Je retrouve Gege et Mimi qui ont encore des pièces de 888 pour moi ! ça fait plaisir de revoir tout ce petit monde en pleine forme.
On a le droit à un vin d’honneur offert par la municipalité, photo officielle des motos sur le grand parking devant la mairie, Gavin l'écossais fort en gueule, est venu avec son proto d’usine. Tu aurais vu le truc en vrai, c’est colossal, impressionnant. L’organisation avait invité son pilote Ciro de Petri qui s’est fait un malin plaisir à sillonner les routes du coin avec les gendarmes aux basques. Marrant la moto n’étant pas immatriculée, l’assurance au nom d’une nénette qui n’est pas le propriétaire, ça s’est corsé quand le Gavin a voulu leur filer 90 euros pour qu’ils rentrent au poulailler. En Gaulle ça s’appelle tentative de corruption mais bon les écossais ne règlent pas les tracas administratifs chez eux comme nous
)) Soirée dînatoire sur des bancs sous un chapiteau à rigoler avec les uns et les autres, écouter des gamins sans voix essayer de faire du rock. Heureusement que Mickey et Marcus ont sorti leurs guitares car les Beattles aphones, c’est pas tout à fait la même soupe…. Bref, fatigué et pompette, dodo sous la tente pour entendre Boby la Seringue scier du bois, pas longtemps, j’étais ivre de fatigue. Réveil très/trop tôt avec le soleil debout mais ça permet de se lever lentement et d’admirer le paysage avec une lumière particulière, l’air étant encore propre de la nuit sans nuage. On charge les motos pour repartir vers 10:00. Petit déjeuner, Lucky et Joel arrivent clopin clopant, la nuit a dû être sévère
salut et bye bye à tout le monde, je pars en me frottant les mains d’avance car je vais repasser par des petites routes pour remonter. Tiens, bruit étrange, la moto s’essouffle et cale dans la montée. C’est con ça. J’ouvre la trappe à essence, serait-ce le plein de hier midi en arrivant qui à bouché le reniflard ? ça redémarre et recale 10 mètres plus loin. Je redescends dans la vallée au camping en roue libre. Merde, j’aime pas ça… Très vite on s’aperçoit que probablement une durite d’essence est pincée et empêche l’admission de bien se faire. Perception d’un collier pour arrondir la partie pincée, chouette, merci Paulo l’italien ! Deux Allemands sympas me poussent, l’éléfant redémarre
à moi la remontée !!! 400 mètres, beeeeeuuuuooooaaaaa prout et pouet. Merde
va falloir réfléchir vite la maintenant car les gars sont tous en train de se tirer et ils ont bien raison et j’entends un écho dans ma tête « si tu as un problème, téléphone moi et on te ramènera » ! c’est Tchi, ce gars de Rouen qui m’avait proposé avant de partir avec sa femme et la moto sur une remorque son aide. Tu parles que je me dépêche de le contacter et super sympa il fait demi-tour ! On décharge sa moto et il me dit que je n’ai qu’à la prendre pour rentrer !!! sans déconner ???? tu prêtes ta moto toi au premier glandu venu pour qu’il aille faire 700 bornes avec? Bah Tchi il a l’esprit motard et généreux, lui il le fait. On décide de prendre l’autoroute pour ne pas être trop tard « cheu » nous.
Collés 70 km derrière une jeune permis qui roule scrupuleusement 10 bornes de moins que la limite réglementaire, donc ca fait vraiment pas vite sur une départementale, je ronge mon frein en regardant ma grosse vache rebondir de son poids délirant de bosse en bosse et sautiller sur la remorque taille mini de Tchi. Je m’y ferai mais ça fait un peu stresser cette histoire. Bref, on atteint enfin l’autoroute et la longue agonie démarre. Le temps est superbe et l’œil sur le niveau de carburant pour ne pas tomber en panne, on avance, on remonte vers le nord. Stop ravitaillement, je suis gêné d’inviter mes sauveurs à avaler un sandwich immonde. T’as déjà mangé un SNCF façon éponge ? Même combat pour l’estomac chez total. La digestion démarre péniblement et le soleil puissant qui généreusement me guide m’endort. Le café n’est pas suffisant pour me garder éveillé. Ce n’est pas une figure de style et le bon Dieu a eu pitié de moi et m’a rattrapé par les bretelles quand endormi la moto est doucement sortie de sa trajectoire monotone…. Je me suis réveillé en sursaut et terrifié par l’idée de ce qui aurait pu se passer. Hallucinant, je me suis endormi au guidon en roulant ! Et beh, avec une telle performance, je ne suis pas prêt de faire le Dakar moi si au bout de deux jours de route, je suis cuit… pour la suite, je me mets à chanter à tue-tête sous le casque pour rester éveillé et me maudit d’avoir pris ce risque de fou. En arrivant au dernier péage de l’A5 avant Paris, je me plante de voie, décidemment, c’est ma journée. Pas de guichetier sur ces merdes modernes automatiques et en appelant le bouton assistance, une voie en colère me dit que je ne suis pas dans la bonne file et que je dois dégager. Tu parles d’une assistance, j’avais remarqué moi-même… je ressors en marche arrière, toutes les voies à droite sont barrées d’une grosse croix rouge. Et à gauche, télépéage uniquement… L’idée de passer sous la barrière me traverse l’esprit. Je retéléphone a la mémère qui me dit un truc que je n’entends pas, quand ça veut pas, ça veut pas…. Finalement un patrouilleur me guide dans la bonne file ou je peux payer par carte bleue. Bah non, ma carte est refusée par la borne ! c’est la seule borne du week end qui a refusé mon pognon. Alors je dois changer encore de voie pour la seule qui accepte du liquide, mais c’est pas fini : elle ne prend pas les billets de 50 et rend la monnaie en pièces de deux euros uniquement…. Mouarf, ils savent recevoir en France….
émotion tout ça, n’ayant pas mon GPS puisque ce n’est pas ma moto, je me retrouve aux portes de Paris non pas par la francilienne comme prévu mais dans Créteil. Oh punaise que c’est lugubre comme zone. On sert les fesses et finissons par nous retrouver sur la bonne route pour la Normandie ou tout est vert et les gens souriants et serviables.
Le plus marrant et bien sûr c’était prévisible, mon Elefant a démarré au premier coup de démarreur. Je lui a remis l’écrou et la BTR manquants, et l’ai range sagement en la traitant de salope J. Merci Tchi pour ta folie douce, prêter ta moto a un mec que tu connais même pas, qui s’endort au guidon et te fait visiter la zone parisienne, faut être motivé hein !
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